L'effet Meissner existe-t-il quelle que soit la valeur du champ magnétique appliqué ?
La réponse est non. Au-delà d'un certain champ appelé champ critique Bc, le matériau ne devient jamais supraconducteur.
Un modèle simple permet de comprendre pourquoi, comme le montre la figure suivante :
On a représenté l'énergie libre U du système en fonction de B. Ici, il faut recourir à la thermodynamique. L'énergie libre est l'énergie d'un système qui évolue à température constante. Elle est égale au travail fourni par ce système.
Dans l'état supraconducteur elle est donnée par l'expression,
C'est la parabole figurée en bleu.
Dans l'état normal, elle est constante :
Au-delà de Bc l'énergie libre de l'état normal est plus faible que l'énergie libre de l'état supraconducteur. Le système reste donc à l'état normal. (Un système quel qu'il soit "choisit" toujours l'état d'énergie minimale à l'équilibre)
On sait maintenant qu'un matériau supraconducteur possède deux paramètres critiques : la température critique Tc et le champ critique Bc. Ces deux grandeurs ne sont pas indépendantes. Cela implique qu'il existe un diagramme de phase. Nous verrons cela plus tard.
f. Revenons à la surface.
On a vu que dans l'état supraconducteur sous champ, on a B = 0 dans le volume et B = Bext à l'extérieur. Que se passe-t-il juste à la surface ? Peut-on passer brutalement de B = 0 à B = Bext sur une distance nulle ?
La réponse est encore une fois, non. En effet, on montre en électromagnétisme, qu'un corps aimanté soumis à une variation spatiale de champ magnétique subit une force proportionnelle à cette variation. Sous forme mathématique cela s'écrit,
F = - dB/dz
Si dz = 0, F est infinie, ce qui est évidement impossible. Il faut donc que la transition de B = Bext vers B = 0 s'effectue sur une certaine distance. Autrement dit le champ magnétique extérieur doit pénétrer dans le matériau supraconducteur.
C'est un phénomène analogue à la pénétration d'un champ électromagnétique dans un conducteur sur une distance qu'on appelle "épaisseur de peau".
En partant des équations de Maxwell complétées par deux équation propres aux supraconducteurs Fritz et Heinz London établissent en 1933 une théorie électromagnétique qui décrit et précise l'effet Meissner.
Dans leur modèle le champ à l'intérieur du supraconducteur suit une loi exponentielle décroissante :
dans laquelle z est la distance d'un point à la surface et la longueur de pénétration de London.
Cette distance est caractéristique du matériau. Pour les amateurs de formule mathématique, elle est donnée par l'expression
Le tableau suivant donne quelques valeurs théoriques et mesurées (extrapolées à T = 0) en nanomètres (nm). Les mesures sont assez imprécises, mais l'accord avec le modèle de London est plutôt satisfaisant.
Elément Al Sn Pb Cd Nb
Longueur théorique 10 34 37 110 39
Longueur mesurée 50 51 39 130 44
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